Fin du blocus partiel au Wuhan, l’impact du Coronavirus sur la tech

L’épidémie de coronavirus n’est pas finie et c’est une vraie catastrophe sanitaire sur place mais certaines entreprises dans la zone de quarantaine du Wuhan ont pu reprendre le travail aujourd’hui. L’occasion de faire un petit bilan de l’impact de l’épidémie dans le secteur.

La « reprise » au Wuhan ne se fait pas sans heurts, tout le personnel n’a pas pu retrouver le chemin du travail et beaucoup d’entreprises fonctionnent encore en sous régime. Les pièces détachées nécessaires au fonctionnement des entreprises ont du mal à circuler, des mesures drastiques concernant le personnel ont cours et beaucoup de procédures ralentissent le rythme habituel du pays.

Beaucoup d’entreprises ont d’ores et déjà annoncé un impact très significatif du virus sur leur chiffre d’affaire au premier trimestre. Dans la fabrication et l’assemblage, bien entendu, mais également dans la conception de produits électroniques. Ce qui impactera des sociétés Chinoises mais également beaucoup de compagnies Taiwanaises. La règle pour beaucoup de sociétés dans le monde des semi conducteurs est de travailler au maximum en flux tendu, le fait que cette crise brise le rythme de production décale d’autant leur mode de fonctionnement et va avoir des répercussions pendant une très longue période.

Les principaux impacts se feront ressentir du côté des ordinateurs portables. Ces derniers étant très majoritairement assemblés en Chine à partir de composants fabriqués en Chine et à Taiwan, ils seront parmi les plus touchés par la mise en quarantaine. Des sociétés d’assemblage comme Compal, Winstron ou Quanta ont bloqué la totalité de leurs fabrications pendant plus d’une semaine. Si les deux entreprises ont repris leurs activité, ce n’est toutefois pas au régime classique. alors qu’il faudrait rattraper un retard déjà énorme en augmentant la production, la plupart des unités de productions sont en large sous-régime. De 20 à 30% de la production prévue il y a 10 à 15 jours commence tout juste à sortir des sites d’assemblage. Une bonne partie de celle-ci ne trouve pas moyen de livrer ce qui est produit.

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Autre souci, un pourcentage important du personnel ne peut pas encore retrouver le chemin des sites de production, il reste confiné sur les différents lieux de vacances. L’épidémie étant advenue au pire moment pour la société chinoise avec un large déplacement de population dans le pays pour le nouvel an. Certains cherchent donc à embaucher de nouvelles têtes, ce qui signifie une période de formation préalable. Un certain retour à la normale devrait avoir lieu à la fin du mois lors des dernières levées de quarantaine mais pendant ce mois de Févier très peu des machines prévues seront sorties des entreprises du secteur. Entreprises qui assemblent des millions de machines chaque années pour une grande partie des marques internationales.

D’autres sociétés, plus robotisées et demandeuses de moins de personnel sont moins impactées en terme de main d’oeuvre en ce moment mais elles rencontrent d’autres soucis. Les usines de fabrication de composants, par exemple, sont toutes aussi coincées. D’abord le fonctionnement à flux tendu fait qu’ils n’ont plus de demande. Pas de portable à construire et moins de cartes à assembler équivaut à la mise au chômage technique des robots d’assemblage. Les problèmes d’approvisionnement en composants et matières premières commencent à se faire sentir. Leur carnet de commandes est en nette baisse avec des assembleurs qui ne peuvent rien assembler. Le résultat de ces mouvements se fera sentir plus tard dans l’année, probablement majoritairement au seconde trimestre, mais cela aura indéniablement un impact dans la durée.

Sur le secteur des smartphones et des tablettes le problème est identique. Suivant les constructeurs et les contrats, la fabrication des smartphones requiert plus ou moins de main d’oeuvre. Le haut de gamme a souvent recours à une fabrication très robotisée tandis que l’entrée de gamme ou les séries courtes font appel à des armées de personnels répétant des tâches simples. Les deux ne seront donc pas touchés de la même manière. Les produits les moins chers vont souffrir des soucis de recrutement et de pénurie de pièces détachées. Le haut de gamme aura surtout des soucis d’approvisionnement. Certains fournisseurs prévoient déjà que le retour à la normale ne se fera pas avant le second trimestre et qu’en attendant, c’est bien le bout du monde si ils peuvent fournir la moitié de leur production du début d’année. Sachant qu’en prime, même si ils ne partagent pas tous les mêmes composants, les grandes marques seront servies avant les plus petites. Si un fabricant de mémoire doit mettre une partie de son personnel sur ses machines, il visera les produits les plus rémunérateurs. Ceux qui équipent les produits haut de gamme de grande marque, avant les autres. D’abord parce que c’est plus rentable et ensuite parce que les contrats liés à la fourniture de ces produits peuvent passer chez un concurrent…

Des marques comme Xiaomi ou Huawei annoncent déjà des baisses de production de plus de 15% sur leurs smartphones. Apple pourrait voir sa production d’iPhone et d’iPad baisser de 10% puisque Foxconn est dans l’impasse sur une partie de son personnel.

Sur d’autres segments comme les composants de PC, la mémoire vive, les cartes mères ou cartes filles, les filières sont également affectées. Un secteur très marqué semble être celui des écrans LCD. La méthode chinoise d’implantation des usines souffre en ce moment de leur solution logique de regroupement. Les trois principaux fabricants d’écrans chinois sont tous réunis dans la même zone du Wuhan, la zone mise en quarantaine à cause du virus. Les entreprises tournent donc en large sous régime et la production est minimale. Les autres sociétés situées hors de cette zone sont également affectées car beaucoup de pièces détachées arrivent d’abord à Wuhan ou sont fabriquées sur place. Ainsi, même si la mise en quarantaine ne les concernait pas, elles sont également en pénurie de composants. Certaines ont décidé de repousser les vacances du 10 au 17 suivant les recommandations de l’état même si elles n’étaient pas forcées de le faire.

De secousses sont donc à craindre en terme de prix et de disponibilités sur toute cette fin de premier trimestre et probablement jusqu’à la fin du second et peut être même au troisième. Face à une production en berne, les prix vont probablement augmenter en sortie d’usine, ce qui impactera logiquement toute la chaîne.

Le drame de ce Coronavirus est avant tout humain avec de nombreux décès sur place mais pour beaucoup de mes contacts, ce premier drame est amplifié par la double peine subie par les populations locales. Des gens qui vont perdre leur travail, des investisseurs qui fuient la zone, des actionnaires papillonnant vers d’autres horizons… Des situations locales très compliquées, surtout au Wuhan et un bout du tunnel que personne ne voit encore très clairement. Certains me parlent d’une double peine avec un problème de santé immédiat mais également un problème économique qui risque de faire beaucoup de dégâts dans la durée. La hausse des tarifs semble bien dérisoire à côté de ces préoccupations, pourtant c’est probablement ce qui nous impactera le plus dans les mois à venir en France comme en Europe.


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4 commentaires sur ce sujet.
  • 17 février 2020 - 17 h 55 min

    parler de reprise c’est surtout pour rassurer les investisseurs. Une reprise fin février pour moi est inenvisageable, en un mois on est passé d’une centaine de décès et de 1500 infectés à 1800 décès et 70000 infectés. initialement, le pic des contaminations étaient prévues pour le mois d’avril. Aujourd’hui, malheureusement personne ne sait quand l’épidémie va se stabiliser. Bon courage à eux.

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  • 17 février 2020 - 23 h 13 min

    Du 9 au 16 fev (1 semaine) 31706 nouveaux infecté et 856 décès en plus. Source: centre du système des siences et d ingénieur de l université de john hopkins

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  • 18 février 2020 - 13 h 00 min

    La spécialisation poussée de chaque pays due à la mondialisation après la la chute du mur de Berlin, plus les flux tendus tout cela montre un modèle économique non fiable et fragile à long terme. Modèle basé sur l’hyper-rentabilité qui profitent surtout à une minorité de dirigeants économiques et politiques mais pas à la majorité des gens. Les emplois précaires et l’obsolescence programmée en sont des exemples.

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  • 18 février 2020 - 15 h 06 min

    @Will: C’est un mauvais argument dans ce cas précis car il suffit qu’une seule pièce soit manquante pour stopper la production du produit final, et même si ce serait mieux reparti, si une usine n’importe où dans le monde est bloquée, les chaines d’assemblages qui en on besoin et qui n’ont aucun soucis, ne pourront pas sortir le produit.

    Ou alors il faut une répartition fragmentée (plusieurs usines produisent plusieurs composants identiques en redondance) et là les prix des produits prennent au mini +50%, et il ne faut pas qu’une usine s’arrête trop longtemps sinon c’est le même problème au final, les usines d’assemblages finiront par manquer de pièces, ce sera juste moins rapide.

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