Qualcomm annonce une solution RISC-V pour Wear OS

Qualcomm va proposer une puce RISC-V pour WearOS de Google. Sous cette phrase anodine, on découvre des bouleversements importants.

Qualcomm produit des solutions ARM pour smartphones, tablettes et autres montres connectées depuis des années. La marque a construit un écosystème complet autour de cet univers. Elle y a englouti des milliards de dollars en recherche et développement et en a fait un allié incontournable depuis des années. Si la marque s’intéresse depuis peu à RISC-V pour ses développements industriels, le fait que Qualcomm annonce, dans un communiqué conjoint avec Google, son souhait de développer une puce sur une autre architecture est donc très important. 

Suunto 7
Le segment choisi est celui des montres connectées et autres bracelets sportifs qui sont aujourd’hui partagés en deux univers. Des solutions ARM d’un côté ou Qualcomm propose d’excellentes solutions Snapdragon W. Les puces RISC-V de l’autre qui permettent à des fabricants comme Xiaomi de développer des bracelets connectés qui se vendent extrêmement bien à cause de leurs prix et de leurs capacités.

Quand la moindre montre sous ARM coûte en général plus d’une centaine d’euros, les solutions proposées sous RISC-V sont vendues une fraction de ce prix. Les modèles de bracelets Mi Band que Xiaomi écoule par millions d’unités chaque année, sont fabriqués autour d’une solution RISC-V qui fait parfaitement l’affaire. Pour ce type d’usage l’architecture RISC-V est absolument parfaite. Sans royalties à payer, elle est peu chère et peut être modelée pour s’adapter à mille usages différents. Ajouter un détecteur de mouvement pour prendre en compte le nombre de pas, un capteur de SpO2 ou un capteur cardiaque ? Aucun souci, les outils existent, l’architecture peut être tout aussi bien adaptée à cet usage ou pour un autre. Mieux, des outils  et algorithmes existent aujourd’hui pour des modes sportifs complexes. Des solutions ont été trouvées pour communiquer avec des smartphones et le seul verrou qui existait encore était dans les limitations imposées par.. Google. Limitations qui vont, mécaniquement, sauter puisque Google annonce également un support de RISC-V pour Wear OS.

Google et Qualcomm annoncent donc une première puce RISC-V pour Wear OS, terrain de jeu autrefois réservé uniquement à ARM.

Pour comprendre le souci actuel de Wear OS et de RISC-V, il faut comprendre la manière dont le dialogue est possible entre les objets connectés que sont les montres avec les smartphones sous Android. Aujourd’hui, quand vous avez un téléphone android, les applications qui détectent la présence d’une montre connectée Wear OS sous ARM proposent bien souvent d’installer une seconde application directement sur votre montre ou votre bracelet. Une fois que les deux applications sont installée, un dialogue est possible entre les deux. Le smartphone pousse via Bluetooth des infos vers la montre directement via l’application. Ainsi, une solution de guidage avec GPS pourra envoyer vers le petit cadran à votre poignet le chemin à suivre pour atteindre votre destination.

Quand la montre utilise autre chose qu’une puce ARM, et donc autre chose que Wear OS, vous avez en général une application dédiée qui est la seule à dialoguer avec la montre. Il existe également des canaux « système » qui permettent des actions très précises comme le retour de notifications de type SMS, reveil, contrôle multimédia ou déclenchement photo. Ces éléments sont liés directement à Android et les montres sous RISC-V peuvent les piloter au même titre qu’un casque filaire peut décrocher ou raccroche un appel via la prise jack d’un smartphone.

L’essentiel du dialogue entre Wear OS et la solution RISC-V passe donc pas une application dédiée qui va collecter les notifications à envoyer vers la montre. Ainsi au lieu de juste vibrer au fond de votre poche, un message Signal ou WhatsApp transitera d’abord vers l’application de la montre avant de parvenir à celle-ci. Cela fonctionne mais cela empêche tout dialogue dans l’autre sens entre la montre et le smartphone. Dans ce sens du retour, il faut également passer par l’application dédiée. Les autres outils installés sur votre smartphone ne reconnaissent pas les éléments en provenance de votre montre. Pour d’évidentes raisons de sécurité, un simple service de santé ou de messagerie ne va pas accepter qu’une autre application lui envoie des données à traiter. Ainsi, il est possible de recevoir une notification d’un message sur sa montre mais il sera impossible de répondre via un petit clavier ou en dictant un message. Comme cela ne sert à rien, le protocole n’est pas pris en compte par le système. On pourra donc tout au plus envoyer des messages préenregistrés directement dans l’application dédiée.

Un Mi Band de Xiaomi sous RISC-V

Cette différence énorme de traitement est un gros frein pour les solutions RISC-V car il n’est pas possible de profiter de toutes les interactions proposées par les montres. Mais si Google se décide à ouvrir la porte à RISC-V sur Wear OS, cela va radicalement changer la donne.

Si on résume les conséquences de ce changement, on a un bouleversement majeur pour la plateforme RISC-V. Avec Qualcomm aux manettes de la production d’une puce de ce type, il y a un mastodonte connu et reconnu capable de porter l’étendard de cette architecture au devant des différents acteurs du marché. Qualcomm devrait être en mesure de développer une solution efficace, performante et moins chère que celle d’ARM puisque sans royalties à payer à ce dernier. Avec Google qui ouvre les portes de Wear OS au système RISC-V c’est un autre problème qui saute. Le dialogue pourra s’établir entre le smartphone et l’objet connecté de la même manière sous ARM que sous RISC-V. Cela gommera totalement la différence entre les montres connectées.

Reste à savoir plusieurs choses. Est-ce que cette annonce est réelle ou sert-elle de moyen de pression sur ARM pour revoir ses prétentions de royalties sur son architecture ? Est-ce que cette ouverture vers RISC-V ne concernera que Qualcomm ou est-ce que d’autres acteurs pourraient être concernés ? Si c’est le cas des entreprises comme Huami qui construit les bracelets et montres Xiaomi / Amazfit pourraient largement en bénéficier également. Enfin, ce serait un manque à gagner important pour ARM qui pourrait perdre énormément de parts de marché avec cette nouvelle concurrence.

Difficile de voir l’avantage réel d’ARM sur ce type de produit si Google ouvre vraiment ses bras à RISC-V. L’acheteur ne sait pas ce qu’il y a dans son bracelet et à vrai dire il s’en moque. Seuls ses usages, l’autonomie  constatée et bien sûr le prix demandé le concerne. Si on lui dit qu’une montre avec une puce Qualcomm lui offre les mêmes avantages que d’habitude pour moins cher, alors il ne se souciera pas vraiment de la puce embarquée… au contraire.

Si on associe ce développement avec l’information d’une future prise en charge d’Android par RISC-V, c’est un vrai tournant pour le marché.

Le communiqué de presse de Qualcomm : 

SAN DIEGO – Octobre 17, 2023 – Qualcomm Technologies, Inc. a annoncé aujourd’hui qu’elle s’appuyait sur sa collaboration de longue date avec Google en proposant une solution RISC-V pour les montres à porter sur soi à utiliser avec Wear OS de Google. Ce cadre élargi permettra de réduire le temps de mise sur le marché des OEM lors du lancement de smartwatches dotées de fonctionnalités avancées telles que des cœurs personnalisés, une faible consommation d’énergie et des performances accrues. D’ici là, les deux entreprises continueront à investir dans les plates-formes Snapdragon Wear en tant que premier fournisseur de silicium pour smartwatches dans l’écosystème Wear OS.

« Qualcomm Technologies est un pilier de l’écosystème Wear OS, fournissant des systèmes haute performance et basse consommation à de nombreux partenaires OEM « , a déclaré Bjorn Kilburn, directeur général de Wear OS chez Google. « Nous sommes ravis d’étendre notre collaboration avec Qualcomm Technologies et de mettre sur le marché une solution RISC-V pour les appareils portables.

« Nous sommes ravis d’exploiter RISC-V et d’étendre notre plate-forme Snapdragon Wear en tant que principal fournisseur de silicium pour Wear OS. Les innovations de notre plate-forme Snapdragon Wear aideront l’écosystème Wear OS à évoluer rapidement et à rationaliser le lancement de nouveaux appareils « , a déclaré Dino Bekis, Vice-président et Directeur général de la division Wearables and Mixed Signal Solutions de Qualcomm Technologies, Inc.

Les deux entreprises ont récemment rejoint d’autres leaders du secteur pour lancer l’écosystème logiciel RISC-V (RISE) et Qualcomm Technologies a récemment annoncé qu’elle investissait dans une nouvelle entreprise pour faire progresser le développement matériel RISC-V

En tant qu’architecture de jeux d’instructions (ISA) ouverte, RISC-V encourage l’innovation en permettant à n’importe quelle entreprise de développer des noyaux entièrement personnalisés. Cela permet à un plus grand nombre d’entreprises d’entrer sur le marché, ce qui renforce l’innovation et la concurrence. L’ouverture, la flexibilité et l’évolutivité de RISC-V profitent à l’ensemble de la chaîne de valeur – des vendeurs de silicium aux équipementiers, en passant par les appareils finaux et les consommateurs.

À propos de Qualcomm

Qualcomm est à l’origine d’un monde où tout et chacun peut être connecté de manière intelligente. Notre feuille de route technologique unique nous permet d’adapter efficacement les technologies qui ont lancé la révolution mobile, notamment la connectivité avancée, les performances élevées, le calcul à faible consommation, l’intelligence sur l’appareil et bien plus encore, à la prochaine génération d’appareils intelligents connectés dans tous les secteurs d’activité. Les innovations de Qualcomm et de notre famille de plates-formes Snapdragon permettront d’assurer une convergence à la pointe du cloud, de transformer les industries, d’accélérer l’économie numérique et de révolutionner la façon dont nous vivons le monde, pour le plus grand bien de tous.

Qualcomm Incorporated comprend notre activité de licence, QTL, et la majeure partie de notre portefeuille de brevets. Qualcomm Technologies, Inc. est une filiale de Qualcomm Incorporated qui gère, avec ses filiales, la quasi-totalité de nos fonctions d’ingénierie, de recherche et de développement, ainsi que la quasi-totalité de nos activités de produits et de services, y compris notre activité de semi-conducteurs QCT. Les produits Snapdragon et Qualcomm sont des produits de Qualcomm Technologies, Inc. et/ou de ses filiales. Les technologies brevetées de Qualcomm sont concédées sous licence par Qualcomm Incorporated. Qualcomm et Snapdragon sont des marques commerciales ou des marques déposées de Qualcomm Incorporated. Snapdragon Wear est un produit de Qualcomm Technologies, Inc. et/ou de ses filiales.

Google, Wear OS by Google et d’autres marques sont des marques commerciales de Google LLC.

 


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6 commentaires sur ce sujet.
  • 18 octobre 2023 - 14 h 17 min

    Je pense qu’il y a peut être aussi d’autres parts de marché a prendre .

    Il me semble qu’aujourd’hui une carte de type RPI sous RISC coute plus ou au moins le prix d’un véritable Raspberry PI.

    IMMAGINONS que ce fabriquant plus connu pour les spécifications de ses puces ARM arrive a sortir un Processeur Intéressant pour des cartes type RPI et des boitiers de TV BOX .

    SI ce fabriquant dispose en plus d’une communauté comme sur le RPI ,les solutions RISC deviendraient plus approchable et plus facile d’utilisation pour un novice qui n’a besoin que d’une solution prête a l’emploi ou facilement utilisable .

    PERSO ,si je n’ai pas besoin d’une montre connectée ,je suis assez GEEK pour aimer mes R-PI mais ne suis pas prêt a investir pour une solution coutant le prix d’un Mini PC d’entrée de gamme .

    Carte type LEECHEE ou ORANGE PI ,le problème c’est que ni LINUX ni ANDROID ne semble vraiment suivit .

    Le couple SNAPDRAGON/GOOGLE me semble donc disposer d’un avantage si il fonctionne vraiment .

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  • 18 octobre 2023 - 18 h 14 min

    Je ne comprend pas trop l’article, j’ai l’impression que l’objectif est juste de sortir un wear OS qui tourne sous RISC-V à la place d’ARM, donc au niveau des fonctionnalités et du fonctionnement pour les applications ça ne change pas grand chose.
    Comme quand Qualcomm présente des pc windows qui tournent sur ARM, c’est juste un changement d’architecture de processeur.

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  • 18 octobre 2023 - 18 h 30 min

    @auie:
    Donc oui fonctionnellement rien de plus rien de moins mais grosse différence sur le ticket d’entrée sur un wearable sous RISC/WearOs car pas de license ARM a payer

    Une future Pixel Watch sous RISC/WearOs à 200€ au lieu de 400€ serait bcp plus intéressant

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  • 18 octobre 2023 - 18 h 55 min

    @auie: L’objectif est de sortir du « tout ARM » avec une alternative plus économique.

    Avoir deux géants qui portent tout le marché du wearable ARM « hors Apple » a eux deux qui décident de dire qu’ils vont travailler avec un concurrent ce n’est pas rien.

    Aujourd’hui pour chaque montre achetée avec un soC ARM il y a des royalties a pyer a ARM et la société est en train de changer ses règles pour faire payer de plsu en plus cher cet accès à son architecture. En face on a un RISC-V qui propose une architecture sans Royalties. Cela donne d’un côté des montres ARM a 200€+ et de l’autre des bracelets RISC-V a 20-30€.

    Si demain, comme dit @calvin, Qualcomm peut proposer des puces de montres moins chères alors il y a fort a parier que le marché s’en empare en masse. Et que ARM perde des Parts de marché sur ce segment…

    Je pense que si Xiaomi sort un nouveau MiBand sous Wear OS, sans perdre en fonctionnalités, l’offre pourrait avoir un énorme impact, même si le tarif gonfle de 40 à 50€ par exemple…

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  • bob
    18 octobre 2023 - 23 h 20 min
  • 19 octobre 2023 - 10 h 40 min

    @Pierre Lecourt : On va dire que c’est cette phrase « Pour comprendre le souci actuel de Wear OS et de RISC-V » et la suite qui pour moi ne marche pas trop car pour le moment il n’y a pas de portage de Wear OS sur RISV-V, il y a juste des montres avec des OS privé qui n’ont pas l’écosystème WearOS que ce soit sur ARM ou RISC-V (beaucoup de montre sportive tournent sur ARM).
    Mais oui je comprend bien l’idée que d’utiliser RISC-V pour ne pas payer de licence ARM et peut réduire le coût et que l’architecture RISC-V peut améliorer l’autonomie.

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