Plusieurs éléments sont intéressants à propos de Project Tango, d’abord il y a la finalité du projet elle même qui peut interroger sur les intentions de Google de concevoir un tel engin. Ensuite il y a l’équipement choisi pour cette version tablette et enfin il reste bien sûr l’aspect technique de l’ensemble.
Project Tango c’est un ensemble d’éléments, de machines, de capteurs, d’algorithmes et de compétences qui savent voir, analyser et transcrire en 3D votre environnement. L’idée est de se servir d’un appareil pour « scanner », le mot est impropre, l’univers qui vous entoure afin d’en créer une réplique logicielle en 3D. Une sorte de cartographie du lieu que vous explorez avec ses murs, ouvertures et meubles.
Le rendu brut d’une tablette ainsi équipée est un fichier 3D pur qui pourra être exploité par diverses applications, c’est pourquoi Nvidia propose dés aujourd’hui des solutions à destination des développeurs. A un prix assez élevé pour un particulier, ces tablettes particulières sont annoncées au prix clin d’oeil de 1024$, elles restent accessibles pour des développeurs et franchement cadeau pour des industriels. Des robots et autres machines savent déjà faire ce que propose Google, à coup de lasers et autres détecteurs, des solutions existent depuis des années pour recréer en 3D un objet ou une pièce entière depuis un système informatique. Seulement ces solutions coûtent au bas mot 10 fois plus cher et sont également souvent très encombrantes.
Fabriquée à plusieurs milliers d’exemplaires, la Project Tango en version tablette sera disponible plus tard dans l’année et je suppose que de nombreux développeurs se sont déjà inscrits pour pouvoir la pré-commander. Les usages prévisibles sont en effet impressionnants, tout dépendra en réalité des capacités de la tablette, mais avec une bonne solution de détection, de l’architecte à l’expert en assurance, de l’agent immobilier au chauffagiste, de très très nombreux métiers trouveraient en une tablette capable de leur dessiner un volume en 3D d’un bâtiment un précieux allié.
La tablette Project Tango est une 7 pouces embarquant un processeur Nvidia Tegra K1, 4 Go de mémoire vive et 128 Go de stockage. Elle dispose de Wifi, de Bluetooth 4.0LE (Low Energy) et pourra en option embarquer un modem 4G. Un materiel hors norme par rapport à nos habitudes de tablettes classique, les 128 Go de SSD semblent nécessaires pour absorber les données enregistrées par l’ensemble tandis que le Nviodia Tegra K1 sera exploité pour profiter des capacités de traitement en calcul de ses 192 coeurs Kepler embarqués.
Reconnaissance de visage effectuée avec une Jetson TK1 sous Tegra K1.
La carte mère Jetson TK1 distribuée depuis quelques semaines et équipée d’un processeur Nvidia Tegra K1 est déjà au centre de très nombreuses solutions de recherche et développement.
La Jetson TK1.
La plupart exploitent les coeurs graphiques embarqués à d’autres tâches que de l’affichage 3D, exploitant plutôt leur capacité de calcul en temps réel CUDA pour jouer justement avec l’imagerie d’une camera.
Le stand Nvidia à la Maker Faire 2014 montrant la Jetson TK1 avec une application radar évaluant la distance des personnes filmées par la carte sous Tegra K1.
La mémoire vive de la Project Tango version tablette qui grimpe à 4 Go montre également que les composants logiciels des applications exploitées ne sont pas au niveau des besoins que nous connaissons sur tablette, il s’agit là d’un vrai ordinateur de travail maquillé en tablette classique.
Enfin classique, il y a tout de même la tripotée de capteurs spécifiques que Google emploie pour détecter l’environnement autour de l’objet : Cela commence bien sur par un capteur a très grand angle pour une tablette puisqu’il s’ouvre sur un champ de vision à 120° permettant d’appréhender plus d’espace par le système. Un second capteur 4 mégapixels est présent, il proposera une finesse de capture de 2,0 µm qui permettra un positionnement précis des éléments 3D dans l’espace.
Un télémètre permet enfin de mesurer précisément l’espace situé entre la tablette et les éléments qui l’entourent. L’ensemble de ces points, associés à un détecteur de mouvement précis permet de voir et de dessiner en temps réel le positionnement 3D d’une pièce et de son mobilier à une échelle qu’on ne sait pas encore exactement identifier : A partir de quel volume la machine est capable de prendre en compte un objet et quelle finesse d’objet le logiciel accepte t-il de garder en mémoire ?
Aparté. Je me souviens qu’en 1994, l’Université Paris Saint-Denis avait invité l’artiste Jeffrey Shaw pour son exposition Articifes 4. Il présentait une pièce numérique qui m’avait assez impressionné et qui reprend pas mal de composants que l’on retrouve dans Project Tango. Il s’agissait d’un écran, les écrans plats n’existaient pas à l’époque, que l’on prenait et que l’on tenait devant soi. Il affichait alors un veau d’or, d’ou le nom de Golden Calf pour cette pièce, en temps réel en s’adaptant à la position dans l’espace de l’écran. Le truc amusant c’est que le pied blanc que l’on voit dans cette vidéo de cette installation, cache en réalité une Silicon Graphics, le must de l’époque en matière de calcul 3D. Un joujou totalement inabordable pour un particulier et à des années lumières des 1024$ demandés par Google pour sa Project Tango… fin de l’aparté.
Reste à connaitre la finalité du projet, on le sait, sous des dehors très généreux, Google n’est pas un philanthrope. Ces développeurs qui achèteront la tablette Project Tango serviront également de beta testeurs au moteur de recherche et la principale question reste en suspens : Que faire de cette technologie dés qu’elle sera prête et fonctionnelle ? Google va t-il l’intégrer par exemple à Android ? La fournir à tous ? Gratuitement à partir du moment où la machine qui héberge le système pourra la prendre en compte ?
De la même façon qu’une tablette disposant d’un capteur photo dorsal compatible peut télécharger l’application photo de Google, une tablette intégrant les capteurs nécessaires à l’exploitation de Project Tango pourra t-elle exploiter les applications de Google ? Et derrière cette question se cache la plus importante, est-ce que google ne veut pas encourager tout le monde à cartographier au mètre prés l’intérieur des immeubles déjà photographiés par Google Maps ? Est-ce que l’étape d’après pour le moteur de recherche n’est pas de proposer aux utilisateurs de venir cartographier les entrailles des maisons pour le moment filmées de très haut ?
Si on voit mal l’intérêt que pourrait en tirer un particulier à part l’aspect ludique que l’on peut développer avec cet objet, filmer son intérieur aura plus de désavantages que d’avantage, on imagine très bien ce que pourraient en faire des professionnels : Locations d’immeubles avec plans complets et détaillés de chaque plateau en ligne. Présentation de magasin rayon par rayon permettant ainsi à quelqu’un équipé d’un objet connecté comme une montre ou une paire de lunettes de se repérer facilement pour trouver le produit qu’il cherche ou autres immersions profitant des capacités de recherche de Google en le misant avec de l’imagerie 3D : Dimensionnement de salles de spectacles, réservation d’une table au restaurant pour x convives et autres propositions mixant réel et planifié comme l’achat sur plan d’un immeuble en retranscrivant la copie d’une réalisation passée et en l’implantant sur un futur emplacement. Autant de services qui pourraient séduire les pros comme les particuliers mais qui posent tout de même quelques questions sur les buts réels de Google.
Project tango est impressionnant et il est probable que le concept puisse devenir grand public un jour avec des prix qui vont s’écrouler petit à petit. Reste que cette machine qui collecte encore et toujours plus de données envahit l’intérieur des murs et que si le projet de cartographier le monde à quelque chose de tout à fait hypnotique, cela reste une énorme menace potentielle sur la vie privée.
2,5€ par mois | 5€ par mois | 10€ par mois | Le montant de votre choix |
J’ai pensé à la même chose, un bon moyen de pousser les gens à fournir à Google une modélisation de l’intérieur des bâtiments pour alimenter Maps.
Ou peut-être ne serait-ce que pour des agents Google afin de leur faire modéliser des lieux publics.
Il ne restera plus ensuite qu’à leur envoyer nos radiographies.
un nouveau joujou pour les experts.
Vous ratez LA vraie question: la prochaine génération de coloscopes seront ils offerts par Google ou Apple?
@xaossiia: Une Joint Venture ?
@Misutsu: Les radios ils les auront en fabricant des machines radio sous Android ^^
@Pierre Lecourt: Ahah, bien vu :p
Yep, & avant même d’avoir un pet de travers, tu auras « l’anti-prout » idoine à l’écran, misère…
@Pierre : déjà fait, parmi les nouveaux matériels d’imagerie médicale, certains fonctionnent sous android sur tablette Samsung… Et c’est aussi mauvais que sous Windows.
Plus sérieusement, Google est peut-être aussi a cours d’idée et d’espace légal de développement, d’où ces projets bizarres pour rassurer les bourses ?
@Dadoo: Toujours aussi grincant ^^ Project Tango c’est lié au rachat de Motorola et c’est pas un service aussi bizarre qu’il n’y parait. Cela aurait même des millions d’applications que ca ne m’étonnerait pas. De là a foncer tête baissée dans le truc, pas sur.
Pour Maps Google a juste eu besoin d’acheter des cartes Sat et d’envoyer ses Google car. Pour faire e reste il a besoin de gens impliquées.
@Dadoo je dirais même que Google s’intéressait déjà à la réalité augmentée avec les Google Glass, ou même simplement des applications smartphone comme SkyMap (et plus récemment leur rachat de l’app Word Lens qui traduit en live du texte tout en intégrant la traduction dans l’image d’origine). Je trouve ça tout à fait logique que Google travaille aussi à améliorer les interactions avec la RA, étant donnée que bosser sur un environnement 3D (la réalité) avec un écran tactile ou une webcam (donc 2D) c’est pas trop ça (nécessité d’utiliser des marqueurs pour les caméras par exemple, comme sur 3DS avec les AR Cards). Maintenant il leur faut aussi un écran 3D ;)
@Pierre : tu n’as pensé à la domotique et au fait qu’on puisse pas facilement à ce jour localiser une personne dans l’espace fermé.
En réalisant la cartographie d’un intérieur (ou extérieur je vois pas pourquoi cela se limite à l’intérieur), on pourra reconnaitre ensuite la ou il est.
C’est particulièrement intéressant pour la domotique.
Ces données 3d (voire 2D) sont déjà exploitées / utilisées par les professionnels. Si on gagne du temps dans l’acquisition pourquoi pas mais ce n’est pas une révolution en ce sens.
Après les satellites, les voitures, les contributeurs auront un outil supplémentaire pour ajouter des données à l’index Google. Plus de précisions, plus de détails.
Imaginons faire la cartographie exacte 3 d d’un grand magasin … et par triangulation localiser un consommateur … on pourra au moment de son passage et arrêt devant un produit qui a attiré son oeil, lui proposer une ristourne ou une offre qui lui fera passer à l’achat !
Sebastien
@aem: Ce que tu « imagines » pour les magasins et la localisation existe déjà et est déjà en service, il s’agit d’iBeacon, une technologie reposant sur le bluetooth low energy pour localiser des « beacons », des petites balises. Ces balises peuvent aussi transmettre un message au téléphone d’un utilisateur se trouvant à proximité, par exemple si tu vas dans un Apple store et que tu t’approches du stand des iMac, tu recevras une notification sur ton téléphone pour te donner des informations.
Il y a aussi une bibliothèque android dispo, donc c’est compatible avec android 4.3+. Pour plus d’infos:
https://en.wikipedia.org/wiki/IBeacon
Une démo dans un musée: https://www.youtube.com/watch?v=N8Y42TsNdqo
Pour ce qui est de réaliser un modèle 3D d’un intérieur de bâtiment, je trouve ça un peu superflu d’avoir un capteur 3D pour une seule utilisation (i.e. quelque chose qui n’a besoin d’être fait qu’une fois). Une fois que ton intérieur est modélisé, plus besoin de le refaire avant des années. Je trouve que c’est un usage très secondaire.
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